Le nerf de la guerre

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La paix, but de la guerre selon Aristote, coûte de plus en plus cher. Pillage et « guerre économique » ont toujours fait partie de la guerre tout court, de même que l’espionnage, clé de voûte des empires terrestres et maritimes.

Cet ouvrage relate trois millénaires de l’histoire militaire du monde sous cet angle, de l’Occident à l’Orient. Ainsi, l’expansion de l’Égypte des pharaons au Sud, à l’Est et à l’Ouest est financée, pendant presque cinq siècles, par les mines d’or de Nubie (Soudan), centre mondial de la production d’or de l’époque. Le « métal jaune », préféré à l’argent métal pour sa rareté, est principalement négocié en Méditerranée dans la cité grecque de Mycènes et… à Troie ! L’empire perse alimente en espèces sonnantes la rivalité entre les cités grecques pendant la guerre du Péloponèse. La capture de son trésor, entreposé notamment à Suse et Persépolis, permet à Alexandre le Grand de poursuivre ses conquêtes jusqu’en Inde et de stimuler ultérieurement le développement du monde hellénistique. Carthage, rivale de Rome dans le bassin méditerranéen, a confié la défense de son empire maritime à des mercenaires (sauf les officiers supérieurs), qu’elle ne parvient plus à payer. Le pillage des trésors et la vente d’esclaves de Carthage, des Gaules, d’Égypte et de Dacie financent les légions romaines, qui représentent près de 80 % du budget de l’État. En outre, leurs conquêtes intègrent à l’empire des territoires riches en minerais et en produits de l’agriculture et de l’élevage et dont certains sont traversés par les routes de la soie, de l’étain, de l’ambre et de l’alun. L’empire musulman des Omeyyades s’enrichit des butins des palais perses, des églises et monastères byzantins et de la recherche des tombes pharaoniques. L’interdiction du prêt à intérêt par le Coran fait la fortune des banquiers juifs, arméniens et, plus tard, italiens. Comme les conquérants arabes, les Vikings pratiquent la razzia des objets de culte en métaux précieux des couvents et vendent, comme esclaves, les hommes les plus robustes et les femmes les plus belles. La « Pax Mongolica », qui sécurise la route de la soie grâce aux unités de cavalerie mobile, est réalisée par la terreur qu’inspirent les hordes mongoles. Leur service d’action psychologique fait croire qu’elles sont plus nombreuses et plus efficaces que les armées des régions envahies. En outre, les Mongols proposent aux villes hostiles d’éviter le saccage par le paiement d’un tribut… qui limitera leurs propres pertes et financera leurs conquêtes futures ! La conquête du nouveau monde nécessite des galions pour transporter ses richesses en Europe et des vaisseaux pour les protéger des pirates. Les Marines militaires, l’artillerie et les fortifications coûtent très cher aux États européens, qui se lancent dans une course aux armements. Dès le XVème siècle, les pays belligérants créent des banques centrales pour financer l’effort militaire, puis la « guerre totale » jusqu’aux deux conflits mondiaux. A la même époque, débute la fabrication de fausses monnaies étrangères pour déstabiliser les pays ennemis. Au XVIIIème siècle, pour étendre son influence, la Grande-Bretagne appuie son armée et sa Marine  par sa « cavalerie d’or de Saint Georges », qui soudoie les personnalités politiques de pays tiers. Aujourd’hui, les trafics de drogues, d’or et de pierres précieuses financent les conflits asymétriques et les manipulations de devises déclenchent des guerres économiques et commerciales.

Loïc Salmon

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« Le nerf de la guerre » par Alessandro Giraudo. Éditions Pierre de Taillac, 448 pages. 25€

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