Territoire national : protection permanente contre intrusions aériennes et maritimes

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En raison de l’état d’urgence en vigueur depuis les attentats terroristes de 2015 à Paris, les postures permanentes de sûreté aérienne et de sauvegarde maritime ont été renforcées en métropole et dans les départements et territoires d’outre-mer.

Approuvées par 84 % d’opinions favorables, ces missions ont fait l’objet de deux présentations à Paris : la participation de l’armée de l’Air par le général de division aérienne Jean-Christophe Zimmermann du Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA), lors d’une conférence de presse le 17 novembre 2016 ; un document de la Marine nationale rendu public à l’occasion d’une conférence organisée par le Centre d’enseignement supérieur de la marine le 16 novembre 2016.

Sûreté aérienne. Le CADOA dispose de 400 personnels et de 90 radars pour garantir la souveraineté aérienne, explique son commandant en second. Il s’agit de déterminer les intentions, hostiles ou non, des 11.000 aéronefs de tous types qui survolent la France et d’assurer la sécurité d’événements importants (COP21 en 2015 et Eurofoot en 2016). Est considéré en infraction tout avion pénétrant dans l’espace aéromaritime national sans autorisation ni plan de vol ni contact radio. Une détection à une distance minimale de 80 km de la côte laisse le temps d’évaluer l’information et de préparer, éventuellement, des mesures plus coercitives. Certaines zones sont interdites de survol en permanence, d’autres pendant une période déterminée. A titre indicatif, il y a eu 80 décollages d’avions de chasse pour alerte réelle entre le 1er janvier et le 15 novembre 2016 (64 pour toute l’année 2015). De même, 38 décollages d’hélicoptères avec tireurs d’élite embarqués (94 en 2015) ont été motivés pour 72 pénétrations de zones interdites (50 en 2015), souvent involontaires, et 37 pertes de communication radio (31 en 2015). Le CDAOA prépare la neutralisation de l’aéronef hostile, mais l’ordre de tir relève du Premier ministre. Toutefois, l’absence de communication de plan de vol et contact radio à proximité de l’espace aéromaritime ne constitue pas une infraction en soi. Ainsi, le 22 septembre 2016, 2 bombardiers lourds supersoniques russes Tu-160 sont passés à l’Ouest de la Norvège et de l’Irlande, puis ont longé les côtes française et espagnole avant de repartir vers le Nord. Toute leur trajectoire a été accompagnée par des intercepteurs norvégiens, puis britanniques, français et espagnols. Dans la nuit du 16 novembre 2016, 3 bombardiers lourds Tu-95 et 3 Iliouchine ravitailleurs ont suivi le même cheminement et dans les mêmes conditions à 400 km des côtes jusqu’au Portugal avant de remonter vers la Russie. Un avion radar AWACS a décollé de Bretagne pour les pister. Par ailleurs, la surveillance spatiale porte sur la détection des passages de satellites étrangers au dessus des forces françaises et alliées, déployées au sol et en mer, et le maintien de la qualité des transmissions. En outre, le grand nombre de satellites en service augmente le risque de collision en orbite avec retombées des débris sur le territoire national. Le CDAOA, le Centre national d’études spatiales, la Direction générale de l’armement et l’Agence spatiale européenne collectent des informations, les analysent et les évaluent pour anticiper les effets possibles, alerter et coordonner. Ils disposent de divers moyens : le système Graves (détection), le centre militaire Cosmos (analyse), les radars Satam (orbitographie et trajectographie de précision), les 2 téléscopes Tarot, le bâtiment d’essais et de mesures Monge et le système d’alerte des tempêtes solaires Fedome (préservation des moyens de télécommunications).

Sauvegarde maritime. La Marine nationale concentre 10 % de ses effectifs à la défense maritime du territoire sur le littoral (22 km de la côte) et dans les eaux de 21 zones sous souveraineté ou juridiction française dans le monde (370 km), indique un document officiel. Le dispositif est articulé en métropole, autour des préfets maritimes de Toulon pour la Méditerranée, Brest pour l’Atlantique et Cherbourg pour la Manche, et outre-mer autour des délégués du gouvernement pour l’action de l’État en mer. Dans chaque préfecture maritime, une cellule de coordination de l’information maritime fusionne les renseignements venant de la Direction des affaires maritimes (DAM), des Gendarmeries maritime et départementale, de la Police de l’air et des frontières, des Douanes et des autorités portuaires, en vue du contrôle et de la surveillance. Ces renseignements sont partagés avec les compagnies maritimes françaises qui contribuent, sur une base volontaire, au contrôle naval. Ce dernier nécessite la signalisation des mouvements et intentions de navires par leurs capitaines qui, en retour, reçoivent les informations relatives aux situations nautique et militaire dans leur zone de navigation. Pour renforcer la prévention, la Marine et la DAM travaillent à la prise en compte, par les navires, de la menace interne (consignes à l’équipage et aux passagers). Chaque année, la Gendarmerie maritime procède à quelque 1.500 contrôles de sûreté de navires. Depuis l’été 2016, des gendarmes maritimes et des fusiliers marins embarquent, de façon aléatoire, sur les grands navires à passagers pour assurer la protection à bord. Des pelotons de 35 gendarmes maritimes peuvent intervenir sur les navires, dans les ports de commerce d’intérêt majeur et en zone d’attente, pour la surveillance, la sécurisation des espaces portuaires, l’escorte des navires sensibles et le contrôle des navires. Les capacités des gendarmes maritimes des ports de Sète et Nice ont été renforcées, afin de réduire les vulnérabilités du trafic des ferries avec la Corse et des navires de croisière en Méditerranée. Le dispositif du plan « Pirate-mer » inclut la Marine, les armées de Terre et de l’Air, le Groupement d’intervention de la gendarmerie nationale et aussi le Bataillon des marins-pompiers de Marseille pour le secours maritime de grande ampleur (plan ORSEC).

Loïc Salmon

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Outre la dissuasion nucléaire avec ses composantes aérienne et sous-marine, la protection du territoire national commence avec l’opération « Sentinelle » (10.000 personnels) et les postures permanentes de sauvegarde maritime et de sûreté aérienne. Elle se prolonge par les opérations de la défense de l’avant : « Barkhane » pour la lutte contre les groupes armés terroristes dans la bande sahélo-saharienne (3.500) ; « Chammal » contre l’État islamique (Daech) en Irak et en Syrie  (1.000) ; « Daman » au Liban (900) ; « Enduring Freedom » et « Atalante » (150 à 350) et des équipes de protection embarquée (70) en océan Indien ; « Corymbe » dans le golfe de Guinée (100) ; petites participations à des opérations sous l’égide de l’ONU, de l’Union européenne ou de l’OTAN (5 à 100 selon les théâtres). Les armées françaises sont aussi déployées comme forces de souveraineté en Nouvelle-Calédonie (1.450), zone Sud de l’océan Indien (1.600), Guyane (2.100), Antilles (1.000) et Polynésie française (900). Enfin, des forces de présence sont stationnées au Sénégal (350), en Côte d’Ivoire (900), au Gabon (350), aux Émirats arabes unis (650) et à Djibouti (1.450).

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